Northern Light

Au Grand Siècle, quand Louis XIV se présentait comme un « Roi Soleil », Charles XI de Suède renchérissait en se faisant qualifier de « sol inocciduus », de « soleil qui ne se couche jamais ». Les deux monarques partageaient une même conception du pouvoir, nécessairement absolu, mais différaient dans leur rapport aux arts. Le Français cherchait à forger un goût unique à son image : à la fois flamboyant et impérieux. Le Suédois prônait, au contraire, l’accueil des rythmes et des mots de l’Europe entière. Les archives de son maître de chapelle, Gustav Düben, témoignent ainsi du passage de compositeurs de talent, venus souvent d’Allemagne mais aussi de l’Italie. Sébastien Daucé, le fondateur de l’ensemble Correspondance, très régulièrement programmé à l’abbaye, a pu consulter ces manuscrits à la bibliothèque de l’université d’Uppsala, la plus ancienne de toute la Scandinavie. Il en a exhumé une quinzaine d’œuvres poignantes, notamment une complainte de Franz Tunder, l’organiste titulaire de l’église Sainte-Marie de Lübeck, où Düben s’est rendu au moins sept fois, ou un chef-d’œuvre d’expressivité musicale de Johann Christoph Bach (le cousin germain du père de Jean-Sébastien). L’interprétation de l’ensemble est ciselée. Sa palette, riche en couleurs, met en valeur la voix souple et ardente de Lucile Richardot, autre fidèle de Royaumont qui vient de remporter la Victoire de la Musique Classique dans la catégorie « Artiste lyrique de l’année ». La mezzo-soprano apporte une réelle profondeur à ces méditations souvent amères sur le sens de la vie, à la façon d’un majestueux soleil du nord qui percerait un ciel d’hiver. Un concert sombrement lumineux !

Ensemble Correspondances, direction Sébastien Daucé

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