De 1968 à nos jours

En 1968, l’ancienne Seine-et-Oise, a disparu au profit de plusieurs nouveaux départements, dont le Val d’Oise. Au fil des ans et des compétences transférées, le Conseil général, devenu Conseil départemental fort de 42 élus en 2015, a pris une importance croissante dans le quotidien des Valdoisiens.

Depuis les années 60, la population de l’actuel Val d’Oise a quasiment doublé ; en un gros demi-siècle elle a gagné autant d’habitants que dans les 110 000 ans précédents, soit depuis le paléolithique moyen où les sites sont assez nombreux pour attester la présence humaine sur notre territoire. Cette évolution du Val d’Oise a été plus rapide que celle de l’ensemble de l’Ile-de-France, comme de la France entière, lesquelles n’ont gagné que, si on peut dire, un tiers d’habitants supplémentaires depuis 50 ans. Depuis 1970, Michel Sardou chante J’habite en France « où y a quand même pas 50 millions d’abrutis », il devrait dire 67 millions aujourd’hui.

La situation valdoisienne particulière résulte des opérations d’aménagement du territoire, dont les grands ensembles de Sarcelles ou les villes nouvelles, et à l’organisation administrative décidée par la loi du 10 juillet 1964 et entrée en vigueur le 1er janvier 1968. La loi avait découpé l’ancienne Seine-et-Oise, qui correspond à la région Ile-de-France sans la Seine-et-Marne, pour créer les départements de Petite et de Grande Couronne actuels. Les Valdoisiens ne pouvaient que s’en réjouir car comme le note le géographe Jean-Claude Cavard, spécialiste de l’urbanisation valdoisienne : « le périmètre excessif du département [la Seine-et-Oise] et des limites ne correspondant pas à des réalités géographiques ont été des freins à la création d’une réelle identité. Sa partie nord (l’actuel Val d’Oise) fut probablement un peu sacrifiée… »

Le Conseil général du Val d’Oise, lui, s’était déjà mis en place le 4 octobre 1967, à la cité administrative de Pontoise. En 1970, il déménage pour la préfecture tout juste achevée ; « aujourd’hui, la préfecture, on ne l’aperçoit plus à moins de 200 mètres, à l’époque on la voyait à 10 kilomètres » témoignait, lors d’un anniversaire précédent, Gérard Claudel, conseiller général de la première heure et grand artisan de la création du Parc naturel régional du Vexin français. Défenseur de la ruralité, il s’inquiétait des limites de l’extension de la ville nouvelle.

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Plantation d'un chêne par Pierre Salvi, Président du Conseil général, en mars 1986

En 1984 le Conseil général intègre enfin ses propres locaux, le Campus à Cergy. C’est qu’un autre épisode important pour la vie de l’institution s’était déroulé en mars 1982, suite aux lois de la décentralisation. Jusque-là soumis à la tutelle du préfet, le Président du Conseil départemental devenait le responsable de l’exécutif départemental. En outre des compétences majeures étaient transférées de l’Etat aux Départements. Elles seront élargies par l’acte II de la décentralisation en 2004. Par exemple la gestion du personnel des collèges en complément de celle des bâtiments, le transfert de routes nationales...

Ces lois ont confié au Département les allocations individuelles de solidarité : RSA, PCH (prestation compensatoire du handicap), APA (allocation personnalisé d’autonomie) pour les personnes âgées. Il est devenu le chef de file de l’action sociale dans le Val d’Oise et la MDPH (Maison départementale des personnes handicapées) est symboliquement construite au cœur du campus. L’action sociale représente aujourd’hui plus de la moitié du budget du Département.

Le Conseil général n’avait pas attendu ces nouveaux pouvoirs pour développer ou soutenir des projets valorisant le jeune département. Ainsi, le pôle d’enseignement supérieur avec l’installation de l’ESSEC en 1973, suivi de l’ENSEA en 1977 et de l’EISTI en 1983. Les réserves foncières constituées par le Département au cœur de l’agglomération étaient notamment destinées à l’extension de ce pôle. Le projet de CY Campus, et celui de la Turbine, portés aujourd’hui par le Département et ses partenaires, montrent que l’engagement n’a pas faibli. Sur les trois dernières décennies, le Département a investi plus de 150 millions d’euros dans l’enseignement supérieur.

Dès 1972, il avait eu l’initiative de structurer en un service départemental d’incendie et de secours, le SDIS 95, les sapeurs-pompiers relevant auparavant de communes aux moyens hétérogènes. Aujourd’hui, le SDIS 95 effectue plus de 95 000 interventions par an, avec une qualité égale de service sur l’ensemble du territoire. Son budget, de 97 millions d’euros, est abondé aux deux tiers par le Département qui préside son conseil d’administration. Au milieu des années 60, l’ancienne Seine-et-Oise comptait 170 sapeurs-pompiers professionnels pour 2 millions d’habitants; le SDIS 95 dispose de plus de 900 professionnels et de plus de 200 agents administratifs.

L’objectif principal de construire l’avenir des Valdoisiens n’a pas amené le Département à négliger son patrimoine et son histoire ; il n’a pas suivi Eugène Pottier et du passé fait table rase. En 1978, il avait acquis l’abbaye Notre-Dame-la-Royale, autrement dite de Maubuisson, qui s’est imposée comme un site d’art contemporain réputé auquel s’ajoutera demain un incubateur de start-up spécialisées dans les industries créatives. Quelques années après Maubuisson, il avait racheté le château classique d’Auvers-sur-Oise et un parcours à la gloire des peintres impressionnistes y avait été installé pour compléter l’offre de ce haut-lieu du tourisme francilien. En 2017 un nouveau parcours immersif l’a remplacé pour permettre aux visiteurs de profiter des dernières technologies numériques. Celles-ci sont aussi entrées au musée archéologique départemental, à Guiry-en-Vexin, inauguré en 1983 pour mettre en valeur les trésors du passé valdoisien, dont la statuaire gallo-romaine trouvée à Genainville, que la commune exposait depuis 1955.

Ce ne sont là que quelques exemples de l’action du Département depuis 50 ans. Quels que soient leurs domaines, volontairement choisis très différents, ils ont en commun d’illustrer les progrès apportés par le Département et son engagement sur la durée.

L’expérience et la proximité lui permettent d’affiner et d’améliorer le service rendu. Par exemple, les dispositifs d’aides aux communes soutiennent leurs investissements mais pour les petites communes rurales une plateforme d’ingénierie a récemment été ajoutée pour compenser leur manque de services techniques.

Or, cette dynamique départementale, qui a fait ses preuves, est aujourd’hui mise en danger par les projets présidentiel et gouvernemental pour l’Ile-de-France. Une nouvelle réorganisation territoriale s’annonce. Mais alors que les précédentes sont toutes allées dans le sens de confier plus de compétences aux collectivités territoriales, au bénéfice des populations, on ferait marche arrière pour revenir à des structures… des années 60. Comment des établissements publics territoriaux (EPT) pourraient-ils gérer des services de proximité comme l’aide sociale à l’enfance ou l’entretien des collèges ?

A la séance inaugurale du Conseil général du Val d’Oise en 1967, son Président, Adolphe Chauvin, également maire de Pontoise, déclarait « Nous sommes embarqués dans une grande aventure ». 50 ans plus tard, l’aventure, et le combat, continuent.