Les Géantes

Les géantes ont disparu. Autrefois, elles vivaient dans nos contes et légendes, à l’ombre des ogres, des titans et des cyclopes. Contrairement à ces figures masculines, caractérisées par leur violence, les géantes étaient porteuses d’attention au monde, d’ouverture à l’autre et de joie de vivre. Le chorégraphe Antoine Arbeit les ressuscite et les place dans un environnement à leur démesure : des chaînes de montagne, qu’elles peuvent déplacer à leur gré. La question du voyage est en effet centrale pour ces colosses qui cherchent leur place dans un monde trop petit pour elles. Le vagabondage des corps et des décors est l’occasion d’entrer en contact, de s’apprivoiser, de se mettre à l’unisson. L’approche de l’autre se fait en douceur. L’écriture ciselée du mouvement, telle que la pratique Antoine Arbeit, amène une grande fluidité. Les gestes s’enchaînent sans rupture, avec – même si le chorégraphe refuse toute dualité caricaturale entre le féminin et le masculin – des courbes toutes maternelles. Au fond, c’est un peu la monumentale silhouette de Gaïa, la personnification de la Terre, qui se cache derrière les deux personnages et qui tisse un lien avec les notions de création, de don de la vie et d’enfance. La connexion à mère nature est également au cœur de la bande sonore conçue par Séverine Morfin. La compositrice, qu’Antoine Arbeit a rencontrée à l’abbaye de Royaumont en 2018, fait chanter le paysage, en insérant dans son œuvre des enregistrements de forêts, de glaciers ou de tempêtes. Maîtresses de ce microcosme fait de sons, de mouvements et de lumières, les géantes entraînent dans leurs pérégrinations petits aux yeux agrandis et grands redevenus petits.

Antoine Arbeit

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