Wolf l’Italien

« Mes chansons italiennes sont ce que j’ai fait de plus original et de plus accompli artistiquement » écrivait Hugo Wolf dans une lettre datée de 1891. Les parents croient toujours que leur nouveau-né est le plus beau du monde mais, dans le cas de l’Italienisches Liederbuch, il faut donner raison au compositeur viennois : il s’agit de son chef-d’œuvre. Après avoir mis en musique les plus grand auteurs allemands, Eduard Mörike (53 lieders), Joseph von Eichendorff (13 lieders) et Johann Wolfgang von Goethe (25 lieders), il s’est intéressé à un recueil de courts poèmes et de chansons italiennes anonymes, collectées et traduites par l’Allemand Paul Heyse, qui obtiendra le Prix Nobel de littérature en 1910. Hugo Wolf les a adaptées pour deux voix, qui se répondent parfois ou parlent en parallèle. Comme chez Schubert, une grande attention est portée aux mots. La musique est immédiate, fougueuse, à l’image des jeunes gens dont elle habille les amours. Il suffit à Wolf de quelques mesures pour exprimer leurs sentiments les plus ardents. Aveux timides, extases, attentes enfiévrées, jalousies maladives, peines immenses, réconciliations inespérées… L’œuvre entrelace musique et poésie pour peindre avec une acuité rare les subtilités des relations humaines. La soprano Emmanuelle de Negri, le baryton Marc Mauillon et la pianiste Anne Le Bozec ont préparé à Royaumont (où Marc Mauillon enseigne chaque année) leur version de ce cycle, réfléchissant intensément à la façon dont il peut s’incarner dans leur corps. Véritable théâtre de l’âme, leur récital offre une perspective nouvelle : le public découvre ou redécouvre enfin toute la force narrative et émotionnelle de la musique de Wolf.

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