Résonances

Il n’est pas interdit d’être multiple. Francis Poulenc, en tout cas, se l’autorisait. « En Poulenc, il y a du moine et du voyou » écrivait son ami, le musicologue Claude Rostand et, en effet, l’auteur du Gloria en sol majeur – qui reste aujourd’hui l’un des titres français les plus donnés en concert dans le monde – avait un pied dans les guinguettes de la Marne, l’autre dans les soirées mondaines de Paris, une oreille tournée vers Debussy, l’autre vers Boulez. Il était à la fois à l’origine des musiques du ballet érotique Les Biches et des Litanies à la vierge noire de Rocamadour. Cette apparente multiplicité n’était que l’expression d’un caractère entier, marqué par un solide appétit pour toutes les beautés qu’offre la vie. A la fin du parcours, force est de reconnaître que le compositeur ne s’est jamais égaré, qu’il a toujours préservé son propre style, son inimitable signature. Cette multiplicité résonne également d’une façon très particulière dans le travail de l’ensemble Aedes, qui a toujours été très attaché à la figure de Poulenc. Le chœur de Mathieu Romano fête ses 20 ans d’existence en revenant à sa Messe en Sol Majeur et aux Quatre petites prières de Saint François d’Assise. Il reprend également la première commande qu’il a passée à un compositeur, en 2008 : Les Trois poèmes d’Eichendorff de Philippe Hersant. Les 28 chanteurs explorent ainsi a cappella la grande diversité de couleurs et d’harmonies de l’art choral, allant de chefs-d’œuvre du répertoire romantique et post-romantique (Brahms, Rachmaninov, Barber) à la musique d’aujourd’hui. Leur son unique, alliage incandescent d’homogénéité et de brillance, de puissance et de rondeur, les autorise eux aussi à être multiples.

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