L'Île aux Oiseaux : le projet de création d’un sanctuaire de biodiversité à Herblay-sur-Seine

Lancé par le Département en 2019, le projet de création d'un sanctuaire de biodiversité sur l'île d'Herblay-sur-Seine est inédit en Île-de-France.
L'histoire de l'île
Située sur la commune d'Herblay-sur-Seine, celle que l'on appelle "L'Île aux Oiseaux" est composée de "L'Île d'Herblay" et de "L'Île Motteau", deux îlots originellement distincts. Avec le temps, les apports sédimentaires du fleuve et les curages ponctuels du chenal ont progressivement joint les deux îles entre elles, n'en formant plus qu'une seule aujourd'hui.
Le site est reconnu comme "Espace paysager remarquable" de la commune d'Herblay-sur-Seine. Par ailleurs, l'île a fait l'objet de plusieurs représentations sur les toiles de peintres impressionnistes ayant fréquenté la Seine. Ainsi, on devine l'île sur plusieurs tableaux des collections du Musée d'Orsay à Paris :
- Paul Signac (1889). Herblay. Brouillard. Opus 208. Huile sur toile
- Maximilien Luce (1890). La Seine à Herblay. Huile sur toile
- Albert Lebourg (1895). A Herblay, soleil couchant par la neige. Huile sur toile
De plus, dans les années 1890, les photographes René Le Bègue et Paul Bergon ont acquis l'île, qu'ils ont utilisée comme un studio de photographie en plein air.
Un espace naturel sensible
Fin 2023, l'île d'Herblay a été classée en Espace Naturel Sensible et renommée, à l'occasion, "L'Île aux oiseaux". Elle rejoint ainsi la cinquantaine de sites naturels non bâtis possédant une valeur écologique ou paysagère particulière, répartis sur le Val d'Oise.
Grâce à cette classification, le Département pourra plus facilement protéger l'îlot et y mener des actions de restauration écologique. À ce jour, l’intérêt écologique de l’île repose sur les plantes aquatiques du bras non navigué de la Seine, qui seront préservées et dont le développement sera favorisé. Le projet de création d’un sanctuaire de biodiversité vise notamment à créer des milieux humides et à remplacer les arbres d’ornement plantés par des essences plus naturelles et adaptées à ces milieux.
Pourquoi ce projet ?
L'île a été utilisée pour la culture céréalière jusque dans les années 1980, avant d'être laissée à l'abandon. Elle est aujourd’hui envahie par des espèces invasives et dispose d’une diversité d’écosystèmes très faible.
Le site n'est pas suffisamment submergé lors des hautes eaux de la Seine, ce qui empêche le développement d’une végétation typique des milieux humides à l’intérieur de l’île. Les milieux humides sont en forte régression à l’échelle nationale : 50 % de leur superficie a disparu entre les années 60 et 90 alors qu’ils sont nécessaires à la survie de 50 % des espèces d’oiseaux et de 30 % des espèces végétales menacées.
Depuis 2019, le Département du Val d'Oise vise à faire de l'île d'Herblay-sur-Seine un sanctuaire de biodiversité. Le projet, rendu possible par l'acquisition presque intégrale de l'île par le Département, consiste en des actions de restauration écologique visant à créer un refuge pour différentes espèces animales et végétales.
Pourquoi vouloir protéger l'île ?
Les abords de l'île hébergent quinze espèces végétales aquatiques rares au niveau régional, comme le Potamot perfolié ou la Sagittaire à feuilles en flèche. Ces espèces végétales forment un habitat pour les Odonates, un ordre d'insectes auquel appartiennent notamment les libellules. La végétation aquatique offre également des zones de ponte pour les poissons et d'abri pour le développement des alevins, principale ressource alimentaire du Martin pêcheur, qui est nicheur sur le site et dont l'espèce est reconnue d'intérêt communautaire.
Ce qui constitue le second enjeu écologique du site, c'est son avifaune, c'est à dire toutes les espèces d'oiseaux qui y vivent. L'île est en effet située sur un axe de migration pour les oiseaux. Les inventaires naturalistes font état de 59 espèces, dont quatre sont reconnues au niveau européen. En plus du Martin pêcheur déjà cité, nous comptons la présence du Héron bihoreau, de la Sterne pierregarin et de l'Aigrette garzette.
Ce projet de sanctuaire est inédit dans notre département. Cette île constitue un véritable enjeu écologique, car elle héberge de nombreuses espèces végétales mais également une végétation aquatique qui en font un lieu privilégié pour les libellules, les poissons et les oiseaux. Le potentiel de renaturation est fort et justifie pleinement notre action.
Céline Villecourt, Vice-présidente déléguée à l'Environnement et au Développement durable
Les actions prévues afin de préserver l'île et développer sa biodiversité
Diverses actions seront menées sur 2025-2026, afin de permettre la renaturation et le développement de la biodiversité de l'Île aux Oiseaux :
- La création, sur les zones les plus basses, de deux petites dépressions humides, qui seront en eau une partie de l’année et pourront accueillir des espèces animales qui leur sont inféodées telles que les oiseaux d’eau, les libellules et demoiselles, les crapauds et grenouilles, etc.
- La création d’une mosaïque de milieux prairiaux avec un gradient d’humidité plus ou moins marqué, sur les zones déjà ouvertes à semi-ouvertes,
- La mise en place d’un accès léger et discret, réservé pour les suivis scientifiques et l'entretien minimum du site. L’accès sera interdit au public pour garantir la quiétude de la faune sauvage.
- L’augmentation de la naturalité du site en laissant des essences locales et diversifiées repousser spontanément.
- La lutte contre les espèces exotiques envahissantes et menaçantes. Parmi ces espèces, on peut citer : l’Ailante glanduleux, l’Elodée dense, le Buddleia de David, l’Erable negundo, mais aussi la Renouée du Japon.
- La préservation d'un écran arboré entre la zone urbanisée (côté Herblay-sur-Seine) et l'usine de traitement des eaux (côté Achères), y compris les peupliers dépérissant,
- Le développement des milieux aquatiques sur les berges du bras non navigué de la Seine ainsi que sur la pointe amont de l'île (trois secteurs)
L’île aux oiseaux sera ensuite rendue inaccessible au public et des mesures seront prises pour limiter la pêche et la navigation dans les eaux, côté bras non navigué. Seuls les partenaires scientifiques pourront se rendre sur l'île, afin de suivre l'évolution et le développement de la biodiversité.
La valorisation du projet pourra être assurée par l'aménagement d'un observatoire sur la berge opposée ou sur les hauteurs de la commune, la mise en place d'un parcours pédagogique à destination des scolaires, et au travers du dispositif Sorties nature en Val d'Oise pour le grand public, déjà initié depuis 2024. Ce territoire d'expérimentation pourra également faire l'objet de stages ou de thèses, en écologie mais aussi en sociologie.
Les espèces présentes sur l'île
La présence de 101 espèces végétales sur cette île est d’autant plus faible que la diversité des habitats est limitée et la part d’espèces invasives trop importante (22% des espèces recensées)
À titre de comparaison sur les propriétés du Département : l’ile d’Herblay-sur-Seine (15 ha) ressence 12 espèces de libellules quand le bois du moulin de Noisement à Chars compte 32 espèces de libellules. Ce bois classé espace naturel sensible a été l’objet de travaux menés par le Département ces dernières années afin de développer la biodiversité.
Pour la faune, certaines espèces sont aussi préoccupantes pour la diversité locale : perruche à collier, tortue de Floride, ragondin notamment…
La faune et la flore à protéger et développer :
- 59 espèces d'oiseaux dont 4 sont reconnues à l’échelle européenne : le Héron bihoreau, le Martin pêcheur (nicheur sur le site), la Sterne pierregarin et l’Aigrette garzette
- 1 espèce d'amphibien : la grenouille verte, ce qui est très faible pour ce type d’écosystème
- 9 espèces de papillons de jour, ce qui est très faible et s’explique par le fait que les milieux sont trop fermés et homogènes
- 3 espèces de sauterelles et 12 espèces de libellules, ce qui est assez faible également pour ce type d’écosystème,
- 15 espèces végétales aquatiques rares au niveau régional dont : le potamot perfolié, le potamot luisant, la sagittaire en feuilles en flèche, essentiellement dans le bras de Seine non navigué.